Le coronavirus a aussi des conséquences sur la procédure civile

© Philippe VANSTEENKISTE et Arne FIERENS

Un des arrêtés royaux (AR) publiés le 9 avril dernier au Moniteur Belge met sur pied des mesures jugées nécessaires par le gouvernement en matière de la procédure civile. Il s’agit plus précisément de l’AR n°2 du 9 avril 2020 concernant la prorogation des délais de prescription et les autres délais pour ester en justice, ainsi que la prorogation des délais de procédure et la procédure écrite devant les cours et tribunaux. Les trois points principaux de cet AR qui portent donc sur 1) la prorogation des délais dans les affaires pendantes, 2) les plaidoiries prévues pendant la période de « lockdown » et 3) la prescription sont brièvement synthétisés ci-après.

La première mesure de l’AR concerne donc les délais de procédure et les délais pour introduire un recours. Concrètement, il s’agit notamment des délais pour déposer des conclusions ou pour interjeter appel. Si ces délais expirent dans la période du 9 avril au 3 mai 2020 inclus (cette date de fin pouvant être reportée par le Roi), ils sont de plein droit, c.à.d. automatiquement, prolongés jusqu’à un mois après la fin de la période de crise. Actuellement, la fin de la période de crise est fixée dans l’AR au 3 mai 2020 en sorte que les délais en question ont au moins été prolongés jusqu’au 3 juin 2020.

Toutefois, cette règle d’exception n’est pas d’application aux procédures pénales (à l’exception des affaires pénales qui concernent uniquement le règlement des intérêts civils), aux procédures disciplinaires et aux délais d’ordre et d’attente.

Bien entendu, la prorogation des délais de conclusions sur base de cette réglementation a également des répercussions sur les délais de conclusions qui suivent cette période prolongée. Les délais ultérieurs sont également de plein droit reportés de manière à ce qu’ils restent aussi long qu’initialement fixés, bien qu’ils ne commencent à courir que plus tard.

Le législateur a illustré cela par l’exemple suivant : « Supposons que A devra conclure pour le 10 avril 2020, B un mois après l’échéance du délai de A et C un mois après l’échéance du délai de B. Et supposons que le délai de A sera en vertu de l’arrêté prolongé jusqu’au 3 juin 2020. Dans ce cas, le délai de B prendra fin le 3 juillet, celui de C le 3 août. Sans confinement, les délais venaient à échéance le 10 avril, le 10 mai et le 10 juin, respectivement pour A, B et C ».

Lorsqu’il y a urgence et que le retard de la procédure présente un danger, la prorogation des délais peut, par requête motivée d’une des parties, être exclue par le juge.

Si le dernier délai de conclusions expire moins d’un mois avant l’audience, cette dernière sera remise de plein droit.

La deuxième mesure de l’AR vise à éviter le contact physique avec les tribunaux et implique que pour toutes les affaires civiles qui devaient en principe être plaidées dans la période du 11 avril au 3 juin 2020, la procédure écrite deviendra la règle et les plaidoiries n’auront donc pas lieu. Ces affaires seront prises en délibérée de plein droit sans plaidoiries, uniquement sur base des pièces et des conclusions. Toutefois, cette procédure écrite ne peut être appliquée que si toutes les parties ont conclu. Si toutes les parties impliquées s’opposent à la procédure écrite, une nouvelle date d’audience devra être fixée. Cette disposition spéciale a deux conséquences importantes : une procédure en débats succincts à l’audience d’introduction (application de l’art. 735 C.J.) est pratiquement exclue et il est impossible de solliciter des jugements par défaut jusqu’au 3 juin 2020.

Enfin, la troisième mesure de l’AR a des conséquences en termes de prescription. Si une prescription menace d’être atteinte dans la période du 9 avril au 3 mai 2020 inclus, le gouvernement a prévu la possibilité de lancer citation (momentanément) jusqu’au 3 juin 2020 inclus afin d’interrompre valablement la prescription conformément à l’article 2244 du Code civil.

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