L’emploi des langues : adieu ou au revoir à la sanction de la nullité absolue en matière judiciaire (civile) ?

© Jacques Vandeuren

L’emploi des langues en matière judiciaire a toujours été un thème sensible dans notre contexte belge.

Par le passé, un certain nombre de vices purement formels étaient sanctionnés par une nullité absolue de l’acte de procédure vicié. Dès lors, même si aucune des parties au procès soulève une nullité, le juge devait d’office proclamer la nullité, et ce, même si l’acte entaché ne causait aucun grief. Cette sévérité s’explique par une logique de protection des minorités linguistiques dans certaines régions.

Dans son élan de réformation, le Ministre de la Justice  Koen Geens n’a pas épargné cette sanction de nullité.

Suite à la loi pot-pourri VI, l’article 40 de la loi sur l’emploi des langues s’est vu profondément amendé. A présent, les violations à ladite loi ne sont plus sanctionnées par une nullité absolue, mais uniquement par une nullité relative.

Il en résulte que le juge (civile) ne devra plus soulever d’office la nullité du chef de violation de la loi sur l’emploi des langues. Cette initiative doit à présent toujours émaner d’une partie, qui devra en outre  prouver que ses intérêts sont lésés par cette violation. Seulement si ces deux conditions sont remplies, le juge pourra décider à la nullité de l’acte de procédure litigieux.

Cette modification est d’application depuis le 9 juin 2018, et ce, à toutes les procédures (civiles) en cours. En ce qui concerne les procédures engagées avant le 9 juin 2018, la nullité absolue demeure la règle générale.

Il est à deviner que les cas de violation de la loi sur l’emploi des langues seront (plus) rarement sanctionnés par nullité dans le futur.

Cette réforme est certes compréhensible et même souhaitable d’un point de vue pragmatique. L’ancienne règlementation était assez rigide et ne laissait aucune marche de manœuvre aux Tribunaux. La nullité d’un acte de procédure pouvait notamment nuire à l’avancement du procès, souvent déjà fort lent, et donc agrandir l’arriéré judiciaire.

En même temps, il faut bien évidemment veiller à ne pas désavouer les principes – pour certains sacrés – de l’emploi des langues en matière judiciaire, d’autant plus qu’il s’agit d’un thème sensible dans notre contexte belgo-belge. Surtout dans les arrondissements Bruxelles et Hal-Vilvorde, scindé  après plus de 50 ans de chamailleries, cette pondération pourrait mener à une application moins stricte des règles sur l’emploi des langues et à une méconnaissance des droits des minorités linguistiques. Cette réglementation n’est donc – pour certains – pas de nature à inspirer confiance.

C’est pourquoi, une proposition de loi datant du 5 juillet 2018 a été soumise à la Chambre des représentants (http://www.dekamer.be/FLWB/PDF/54/3220/54K3220001.pdf) afin de revenir à l’ancien système.

Affaire à suivre …

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